Narrative, identity and the therapeutic encounter

Cet article explore la place du narratif dans la constitution du Moi et examine, à travers ce prisme, son rôle multifactoriel dans la rencontre clinique. Il commence par expliquer et évaluer de façon critique le point de vue récent de Schachtman et al., selon lequel le narratif constituerait entièrement le Moi. Sous cet angle, le rôle que joue le narratif n'est pas simplement descriptif, mais sert plus fondamentalement de sous-strate ontologique sur laquelle l'identité est invariablement construite et soutenue. Perçu comme tel, cette capacité peut typiquement moduler les sens, motivations et attitudes que les individus adoptent en réagissant et en anticipant les événements de leur vie. Les actes de narration de soi peuvent servir non seulement à décrire les faits pertinents de la vie de quelqu'un, mais peuvent également influencer de façon réfléchie l'état des choses qu'ils tentent de décrire. Après avoir considéré l'attrait théorique de cette perspective, nous fournissons des arguments qui réfutent cette théorie en nous basant sur des cas de neuropsychiatrie clinique dans lesquels les défaillances du narratif - telles que celles observées dans les cas de démence, de troubles dissociatifs de l'identité, de l'autisme et du syndrome amnésique - n'entraînent pas une perte systématique du Moi. L'analyse de ces cas révèle qu'il y a plus que le narratif qui soit constitutif de l'individualité et de l'identité. Ceci nous porte à nous questionner sur l'absence d'un récit de soi articulé et si celui-ci doit être interprété comme d'une preuve d'incapacité, ou bien comme d'une preuve que l'agent n'est plus motivé à l'exprimer. Nous soutiendrons que, plutôt qu'une construction monotonique, la fonction narrative est celle d'un cadre de capacités croisées à ressemblance familiale et une texture ouverte caractéristique qui se combine de manière variable pour donner des Moi ne présentant pas un dénominateur commun unique mais plutôt un groupe dynamique d'ensemble. Nous identifions six autres dimensions symbiotiques qui contribuent à maintenir l'échafaudage du Moi intact et les possibles perturbations pour chacune de ces dimensions, qui peuvent mener à des pathologies distinctes. En particulier, les capacités de représentation de soi et de l'autre ; l'unité diachronique ; l'unité synchronique ; la conscience (notamment la conscientisation) ; l'enchâssement écologique et l'unité cognitive sont expliqués, évalués, de même que les pathologies qui peuvent émerger dans les contextes de perturbation pour chacun de ces cas. Nous avançons que les possibilités de recherche portant sur l'étude des strates neurologiques correspondant à ces différentes dimensions de l'identité et sur comment ces systèmes neurologiques fusionnent un soi phénoménologiquement intégré et unifié sont indispensables. Un éclaircissement de ces problématiques pourrait mettre en lumière la façon dont les lésions cérébrales affectent l'élaboration du Moi. Cette recherche pourrait inclure des études en neuroimagerie fonctionnelles, une modulation non invasive du cerveau, (par exemple une stimulation magnétique transcrânienne ; une stimulation transcrânienne à courant direct), et des tests neuropsychologiques ciblés pour les individus ayant des perturbations apparentes du Moi. Stratifiée en fonction des différentes dimensions élucidées, cette recherche permettrait de découvrir les énigmatiques neuroanatomie et neurophysiologie de l'individualité. La nature interdisciplinaire de chacune de ces possibilités réaffirme l'importance des collaborations profondes et soutenues entre les philosophes, les éthiciens, les cliniciens et les chercheurs, afin d'optimiser et d'avancer les approches des pathologies de l'esprit et de l'identité. Nous abordons les développements des résultats neuroéthiques de la narration du soi. Cette discussion inclut les implications pour le traitement des individus ayant des conditions neurodégénératives - à travers lesquelles le Moi est remis en question - pour la fondation et la création des désirs de vie et pour les approches face à la gestion de la douleur pour les individus ayant des troubles de la conscience. Bien que le narratif, quand il est exprimé, offre une fenêtre vitale sur l'expérience du patient, les failles du narratif peuvent être tout aussi centrales pour la psychanalyse du Moi et la rencontre thérapeutique. Ce qui n'est pas et ne peut pas être dit est souvent tout aussi important que ce qui est narré.