Espace et temps des corps chez Samuel Beckett

RésuméDe quoi est-on sujet ? Cette question majeure travaille l’œuvre de Beckett de façon si obstinée que le lecteur se trouve parfois déconcerté d’être témoin d’une lutte vitale dont il ne perçoit pas toujours l’enjeu. Si le désir d’avènement du sujet en est la cause, comment le localiser ? Pour ne pas détourner Beckett de sa propre démarche, nous le suivrons dans sa lecture de Proust. Où Proust sauve l’amour, Beckett sauve le désir et les corps. Dès lors, nous suivrons les corps de Watt, Molloy et de L’innommable, à leur façon d’élire des objets qui les orienteront dans l’espace qu’ils définiront. Becket ne déduira ni que ces objets sont supposés par un sujet, ni même que ces objets supposent un sujet, mais qu’ils supposent un corps et que ce corps suppose un sujet topologique. Ainsi, à suivre les objets du corps, Beckett obtient le dit d’un sujet. Ce faisant, l’on se demandera si l’on n’est pas passé du sujet de la science avec Proust, au corps de la science avec Beckett. Ainsi, Proust n’a pas influencé Beckett, mais l’analyse qu’il en fit détermina sa position éthique d’un bien-dire, que nous démontrons. Il en résulte que Beckett démontre que de Proust à lui, l’on est probablement passé du sujet de la science au corps de la science. Pourtant, par l’écrit, Beckett parvient à tenir sur un sujet encore possible.

What are we subject of? This major question works the work of Beckett in such a stubborn way that the reader, witnessing a vital fight of which he does not perceive the challenge, is embarrassed. If the desire to rise the subject is the cause, how to localize it? Mindful not to deflect Beckett from his own personal approach, we will examine him through his reading of Proust. Whereas Proust purports to save love, Beckett saves the body. From this perspective, we will read Watt, Molloy and The Unnamable, focusing closely on the bodies and the way the objects, which will direct them in the space that they will define, are chosen. Becket does not deduce that these objects are assumed by a subject, or even that these objects imply a subject; he supposes a body which assumes a topological subject. Thus, by tracking the objects provided by the body, Beckett gets the subject's saying. In doing so, one wonders if the subject of the science with Proust is not replaced by the body of the science with Beckett. Thus, Proust did not affect Beckett; his analysis has determined his ethical stance as shown. Yet, in writing, Beckett keeps on a subject still possible.